Titre aguicheur vous me direz. Pourtant, c’est bien ce que représente le catch. Une ribambelle « d’évènements » que j’essaierai de clarifier ici.

J’imagine bien ce que vous allez me dire. Le catch, c’est faux. Le catch, c’est truqué. Alors oui, ce qu’il se passe est prévu, des scénaristes en coulisses écrivent tout le scénario des shows dans lesquels les catcheurs se montrent. Bref, rien n’est naturel mais ce constat doit-il décrédibiliser cette discipline ?

L’imprévisibilité du catch

C’est indéniable, le catch c’est con. Vous avez, parmi une multitude d’exemples, une équipe de trois compétiteurs dont les actions oscillent entre ingurgiter et balancer des pancakes, une doublure vivante de cinéma qui reproduit absolument tout ce que son compère effectue ou bien encore un catcheur qui provient soi-disant de la vallée des morts. Or, justement, c’est ça la spécificité du catch, son côté imprévisible. Tout peut arriver. Illustration : Mesdames et Monsieurs, le seul et unique Donald Trump a même fait une apparition au superbowl du catch, Wrestlemania. Pas le plus préparé des arguments, j’en conviens. Mais une belle opportunité de mettre en exergue cette spécificité du catch. Ne serait-ce que récemment, le grand boss de la compagnie majeure, la WWE, Vince McMahon (âgé de 76 ans) a même combattu une nouvelle fois pendant ce superbowl

Ce dernier fait même partie de la ribambelle de personnages mémorable de l’histoire de ce sport ? Ce sport-divertissement ? Car oui, les catcheurs sont des personnages.

A la différence des séries où les acteurs disparaissent lorsque la caméra s’éteint, ces athlètes jouent leur rôles, en permanence.

A la différence des sportifs qui doivent tout faire pour gagner leur match, ces lutteurs doivent avant tout divertir le public, leur faire vivre l’excitation et l’exaltation qu’eux-mêmes ressentent

C’est ce qui rend ces personnages si attachant. Le dépassement de soi, l’engouement qu’ils procurent sans même parler des joutes verbales (dont on s’attardera plus tard) qui sont des facteurs déterminants à l’appréciation de cette discipline. Quand t’admires de tes propres yeux le retour de catcheurs que t’as suivi pendant ton enfance, alors qu’ils ont dû prendre leur retraite et arrêter ce pourquoi ils se sont battus toute leur vie, là c’est le côté sportif qui ressort. Mais quand tu vois le jeu d’acteur que certains possèdent, là tu te rends compte de la polyvalence dont ils sont capables. Illustration bis : Daniel Bryan (un catcheur, logique) est passé d’un « underdog » adulé de tous à un écolo végan qui critique tous les méandres environnementaux de la société actuelle. Purement exceptionnel (CNEWS en a même fait un article, c’est dire).

Son côté mémorable

(sans transition) Comme mentionné au préalable, j’aimerais m’attarder ici sur ce que je considère, avec les personnages, comme la dimension la plus mémorable du catch. Les joutes verbales aka les Promos. Le concept paraît très simple et l’est. A la manière de Rap Contenders ou de 8 Mile, tu donnes un micro à chacun des combattants sur le ring et tu les laisses faire. Les locuteurs se répondent alors coup pour coup à l’aide de références du passé (qui dérivent parfois avec mégarde), d’expressions faciales et d’un public qui ne peut s’empêcher de rentrer dans l’ambiance électrique de cette confrontation. Au haut niveau, c’est quelque peu make or break. Des légendes qui ont marqué leur empreinte sur une génération viennent vraiment de ce type discours qu’ils clament devant ces milliers de personnes à qui ils s’adressent et ça peut clairement le ou la propulser tout en haut de l’échelle catchesque avec une hype dont on ne soupçonnait l’existence. Aucune autre discipline ne renferme une catégorie regroupant un tel mélange d’authenticité, de passion et de réaction.

Même du côté des fans, il y a de quoi s’y retrouver. C’est une évidence que regarder du catch à 10 ans où en pleine trentaine change ton point de vue. La première catégorie s’englobe plutôt autour des marks, c’est-à-dire regarder le produit comme si tout était vrai sans aucun trucage ou planification ou alors des smarts, analyser la moindre décision prise par les officiels de l’entreprise en question. Des extrêmes dans les deux cas. L’idée de génie qui a été trouvé est la création de smarks mélangeant les deux autres catégories. Quand des batailles de clan pour imposer son avis émergent sur Reddit ou le 18/25, il est assez probable que les humains derrière leur écran fassent partie de ces smarks.

Ces fans, par leurs réactions démesurées, orientent quel catcheur devrait être mis en avant. Cela semblerait être un pari gagnant dans le sens où nous serions contents du résultat tandis que les businessmen recevraient un certain retour sur investissement dans les produits dérivés vendus ou les tickets à l’entrée provenant de l’émulation provoquée par ces athlètes. Ce qui est beau c’est que ces dirigeants ignorent (un peu trop souvent) notre voix et cela rend le futur encore plus imprévidible et plus excitant.

Tantôt ils vont parvenir à vous décrocher la bouche de notre visage, tant ce qu’il se passe sous nos yeux ébahis semble surréaliste. Tantôt ils vont nous réussir à ne pas nous empêcher de vouloir casser notre écran tant la prévisibilité du booking est monstrueuse.

Nous en France, on a eu la chance d’être assez bien entourés concernant cette discipline. Tout d’abord grâce au canal de diffusion proposé. Pendant la majeure partie des années 2010, les pay-per-view, les événements mensuels (ou presque) de catch regroupant la culmination des feuds étaient retransmis en direct sur une chaîne française, le tout assaisonné de commentateurs de légende. Pour ne pas les citer, Philippe Chéreau et Christophe Agius. La recette parfaite pour une soirée enflammée.

Epilogue

Mais je m’égare là. Ce que je voulais vous témoigner ici est avant tout une certaine apologie d’une discipline sous-représentée, vu par beaucoup (trop de personnes) comme deux ou plus débiles qui se donnent des faux coups de poing. C’est vrai qu’il y a une part de vérité, lorsque les personnes qui prévoient le show font un travail délétère envers ce sport-divertissement, là ça coince et ça rend très pauvre le contenu du catch. Mais lorsque tout est bien exécuté, le catch parvient à devenir (avis personnel) la forme d’art la plus intrigante qu’il existe.

PS: petite vidéo si vous avez aimé (que) mon article (ne contienne pas de référence à la prépa)

Maël HADJ