En cette période de confinement il est temps de se mettre à la page concernant les films et séries pour lesquels vous êtes en retard, faire des apéros sur zoom ou même braver le confinement sans son attestation pour transformer son jogging en entrainement de 100m. Personnellement j’ai choisi la première option alors accrochez-vous, aujourd’hui nous allons parler ornithologie, boucle spatio-temporelle et marketing agressif. Si vous en doutiez encore, vous êtes bien sur la Litto’sphère. Bienvenue, asseyez-vous, prenez une tisane ou un pastis, je vais vous parler de Vivarium.

 

Un ovni porté par Jesse Eisenberg

 

J’ai eu l’occasion de voir ce film en avant-première et donc avant le confinement au festival de Gérardmer, une ville reculée des Vosges. D’ailleurs, il y a peu de chances que vous connaissiez son réalisateur, Lorcan Finnegan, tout comme la plupart des acteurs à part Jesse Eisenberg. C’est donc plutôt agréable de voir que des acteurs renommés jouent encore dans des films peu médiatisés. De plus, ce film est assez adapté à la période de confinement, vous comprendrez par la suite pourquoi je dis ça. A présent, laissez-moi vous parler de l’histoire :

Tout commence par un scénario classique, un couple cherche une maison où s’installer. Ils remarquent donc une agence immobilière qui vend des maisons dans un complexe résidentiel nommé Vauvert. Dès leur arrivée dans l’agence, un étrange vendeur un peu trop porté sur le marketing et les techniques de ventes agressives leur propose immédiatement de visiter une maison. Devant l’insistance de l’employé, Tom et Gemma acceptent.

Ils se rendent donc bien loin de la ville dans ce complexe où toutes les habitations sont parfaitement identiques. Pendant qu’ils découvrent leur maison, leur guide se met à agir bizarrement puis disparaît. Voilà donc notre couple laissé à lui-même et, pour ne rien arranger, lorsqu’il essaie de rentrer en ville, il se retrouve toujours face à cette même maison inquiétante. Après avoir subi cette joyeuse boucle spatio-temporelle, un carton contenant un nourrisson est déposé devant la maison avec l’instruction d’éduquer le garçon. A partir de là tout dérape et une déchéance inexorable s’amorce pour le couple.

 

 Un film au message et à la réalisation classique mais efficace.

 

Commençons par parler de la réalisation, des décors et des acteurs. Le maître mot ici est dépouillement. Les décors sont très épurés, la maison ressemble à tous les pavillons de banlieues américaines, il y a peu d’effets spéciaux, de jeux de lumière, de couleurs ou de caméra. Cependant là où ce dépouillement aurait été un handicap pour de nombreux autres films, c’est une force pour Vivarium. Cela renforce l’effet anxiogène et étouffant du film. Vous en avez marre du confinement, je vous conseille donc de regarder ce film pour devenir définitivement fou. En voyant que les personnages n’ont absolument aucune issue, à part la mort, pour s’échapper du complexe résidentiel, n’importe quel agoraphobe en viendrait à aimer la foule. De même les jeux d’acteurs de Jesse Eisenberg et Imogen Poots renforcent le désespoir que renvoie ce film. Ils sont à la fois jeunes et pourtant capables de prouesses quand il s’agit de transmettre un sentiment de détresse chez le spectateur.

Toutefois le réel intérêt du film repose sur le message qu’il véhicule. En effet Vivarium s’interroge sur la pression de la société vis-à-vis des modèles familiaux et de la consommation. Je m’explique : le couple que l’on suit est parfaitement heureux mais, une force supérieure va leur imposer un enfant ainsi qu’un modèle de famille nucléaire. Eux-mêmes n’ont pas vraiment envie d’élever un enfant et sont démunis devant cette charge, tous leurs projets s’effondrent. Contraints de devenir parents, ils s’éloignent peu à peu l’un de l’autre, détruisant par la même occasion leur couple. On remarque donc rapidement que cette vision de la famille est nocive pour ce couple. De même, les aliments qu’ils consomment n’ont aucun goût et la télévision ne passe qu’un enchaînement de formes géométriques dénuées de sens. On voit donc que la consommation est réduite au minimum et n’est qu’utilitaire, tout devient futile. On en revient donc à se poser ces questions : que reste-t-il d’utile ou de divertissant ? Doit-on vivre avec des aspirations précises ou suivre ce que l’on nous dit de faire pour notre propre bien ?

 

 

L’élément fantastique vient ajouter une couche de mystère à des questions déjà complexes.

 

Comme si tout cela ne suffisait pas, le film devient encore plus cryptique lorsque l’on se rend compte, que l’enfant qui est imposé au couple et cette vie préprogrammée n’est autre que la méthode qu’utilise le coucou pour parasiter le nid d’un autre oiseau. L’enfant étranger étant l’oisillon du coucou et le couple le nid d’un autre oiseau. Cette théorie est renforcée lorsque l’on voit l’enfant émettre un cri semblable à celui d’un oiseau à un moment décisif du film. Malheureusement le côté mystérieux est mal exploité et pas assez poussé. Les quelques scènes montrant cette facette du film ne nous en apprennent pas beaucoup plus. Elles auraient simplement pu être supprimées sans détériorer le message du film. Donc si vous êtes un fan d’ornithologie n’allez pas voir ce film en vous disant que vous en apprendrez plus sur la biologie du coucou. Cette partie mineure n’est traitée que partiellement dans le film.

 

Conclusion

 

Si je devais vous donner un conseil, ce serait surtout d’aller voir le film pour vous faire un avis personnel sur celui-ci. Il est difficile de décrire ce que l’on peut ressentir lorsque l’on se projette dans ce film. Certains le prendront au second degré quand d’autres se reconnaitront dans la situation du couple. Comme de nombreux thrillers psychologiques, c’est au spectateur de se faire une réelle opinion sur le film et d’interpréter le message comme il le souhaite. En attendant, je vous laisse, je vais me refaire toute la saga des Saw avant la sortie de Spirale, en espérant que le confinement soit fini d’ici là.