La Litto’sphère était au festival Les Historiques de Montbazon organisée par les youtubeurs Calidoscope et Nota Bene afin de rencontrer de nombreux acteurs du monde de la vulgarisation culturelle sur internet.

 

Litto’sphère : Bonjour, est-ce que tu pourrais te présenter et présenter ta chaîne ?

 

Lex : Je m’appelle donc Lex Tutor, j’ai une chaîne d’éducation populaire en droit, orientation philosophie du droit, social et politique

 

L : Et du coup quelle approche utilises-tu pour aborder le droit, étant donné que c’est une approche assez dure ?

 

Lex : J’essaie de trouver la meilleure manière d’intégrer le droit au débat public, que les gens se l’approprient. J’essaie de trouver le véhicule le plus confortable pour les informations que j’essaie de diffuser.

 

L : En passant notamment par des sujets de culture geek, comme par exemple « Tuer un zombie est-il un meurtre ? »

 

 

 

Lex : Je crois en fait que les œuvres de pop culture parlent à tout le monde. Tout le monde connaît les références à la pop culture, tout le monde connaît Batman, les Stormtroopers… En ce moment je travaille sur une vidéo sur Zelda. A partir du moment où les gens sont un terreau favorable et là on peut leur apporter de nouvelles idées.

 

L : Du coup tu essaies de passer par du concret et des trucs rigolos qui parlent, pour interpeler avant d’arriver à du conceptuel ?

 

Lex : Oui c’est ça, sachant que malgré les titres ou les sujets rigolos, ce sont toujours des questions de fonds qui sont posées ou qui se posent toujours en droit. Si tu prends par exemple les Stormtroopers, c’est un sujet drôle mais la question du clonage est un sujet fondamental en droit actuellement parce c’est exactement la même question pour les zombies, les robots… L’intelligence artificielle est une question que tous les juristes se posent en ce moment : le droit doit-il précéder la science, est-ce que c’est la science qui doit précéder le droit ? Comment fait-on ? Si tu attends que le clonage reproductif soit légal et que tu fais une législation après, il va peut-être y avoir un moment de flottement où on ne sait pas quoi faire au niveau moral, juridique etc. Si tu préviens, tu vas ralentir la science, et là on ralentit la science actuellement. Le droit ralentit la science parce qu’il a décidé de la freiner.

 

 

 

L : Et est-ce que tu as l’impression de prolonger les œuvres dont tu parles ou d’innover sur des concepts encore inouïs ?

 

Lex : Je pense qu’il serait un peu prétentieux de dire que j’innove mais il est clair que ce sont des réflexions propres. J’ai des mois de lecture avant chaque vidéo, mais ce sont des réflexions propres. Il est cependant probable que d’autres les ont déjà eues avant et ce, bien mieux que moi.

 

L : Et est-ce que tu trouves un public pour ton contenu par rapport à tes sujets, que ce soit de la pop culture ou du droit, qui écoute ce que tu dis ?

 

Lex : J’ai un public de dingue, j’ai des personnes qui s’abonnent à cette chaîne ! *rires* NDLR : La chaîne Lex Tutor a à ce jour presque 60 000 abonnés. Il y a des gens qui suivent le droit, qui se disent « Oh le droit c’est intéressant ! ». C’est improbable, complètement improbable : il n’y a rien de plus volontairement hermétique que le droit. Les gens sont attirés par la pop culture et je crois peut-être qu’ils restent pour le droit.

 

L : Et est-ce que la sphère du droit réussit à se trouver sa place dans la sphère YouTube en général ou est-ce qu’elle demeure un groupuscule ?

 

Lex : En termes de chiffres, on demeure un groupuscule, si on se compare par exemple aux sciences humaines, l’histoire… Après, des chaînes de droit, il y en a plusieurs. Mais je ne suis pas du tout dans la même démarche. On a des démarches complètement différentes. De très bonnes chaînes comme 911 Avocat d’Héloïse Wagner donnent des points de droit, comme « a-t-on le droit de faire ça ? » avant de donner la réponse. Ce n’est pas du tout ce que j’essaie de faire avec ma chaîne. Je pense qu’on se complète et j’espère que ça va se poursuivre.

 

 

 

L : Est-ce que tu aurais un conseil pour des gens qui se lancent dans le milieu très spécifique du droit ?

 

Lex : Je pense qu’il faut être régulier. Je suis un super mauvais conseil pour les conseils (je ne monétise pas ma chaîne, je n’ai pas de Tipee, je suis ultra irrégulier dans mes vidéos…). Le conseil que j’ai donné à Ben (de la chaîne d’Histoire Nota Bene) qui me l’a demandé est de rester éthique. Il y a de gros problèmes d’éthique sur YouTube parce qu’aujourd’hui le droit français ne prend pas du tout en compte internet et notamment sur la publicité. On a la loi pour la confiance dans l’économie numérique qui a bientôt douze ans, qui n’est pas du tout adaptée aux médias et aux réseaux actuels, et on a beaucoup de problèmes avec la publicité masquée, avec les placements de produits depuis un moment. Si je devais donner un conseil aux gens qui se lancent sur YouTube et même dans n’importe quel domaine dans la fiction etc. ce serait de rester éthique parce que si nous on ne le fait pas, personne ne le fera. Il n’y a pas d’initiative en ce moment, pas de discussion au niveau de l’Assemblée, des députés ou du Sénat, il n’y a pas de régulation. Je crois que si ça ne vient pas de nous, en fait ça ne viendra pas. Donc si les vidéastes ne sont pas éthiques, le milieu ne sera pas éthique.

 

Merci beaucoup à Lex Tutor d’avoir pris le temps de répondre à nos questions ! Retrouvez-le sur sa chaîne YouTube.