Chers lecteurs, je tiens à vous préciser que cette critique sera la plus personnelle que j’ai pu écrire jusqu’à présent. Je me suis longtemps interdit de voir ce film, craignant qu’il me projette, tel un miroir, un reflet que je cherche tant à fuir. Mais j’ai décidé, un jour, de m’affranchir de cet interdit et je ne le regrette pas un instant. Jamais, dans tous les films que j’ai pu voir, je n’ai eu l’impression de saisir aussi bien le propos, comme si l’œuvre me parlait. Je vous présente donc mon analyse du Discours d’un Roi, l’histoire simple d’un roi bègue.

La Solitude

 

          Le roi Georges VI, ou devrais-je dire Albert Georges surnommé « Bertie », nous est présenté comme bien entouré que ce soit par sa famille ou les membres de la Cour. Cependant, Albert se sent terriblement seul malgré ses occupations et son vaste entourage.

La première scène de l’œuvre exprime à merveille toute la solitude de cet homme miné par son handicap. Alors qu’il doit faire le discours de clôture de l’exposition Britannique, ses proches essayent de le conseiller avant sa prestation. Mais, lui sait bien que tout cela est futile car il est définitivement seul face au micro, face à lui-même.

Dans cette situation, on pense craindre le jugement des autres alors qu’en fait le véritable malaise vient du fait que l’on se juge soit même, que l’on a honte d’être incapable de faire ce que les autres font si facilement. Le film nous communique ce malaise dans ce discours car Bertie entend son propre écho dans les enceintes du stade, devant subir l’écoute de son débit de parole erratique, une expérience bien plus douloureuse pour l’estime personnel que de voir les spectateurs détourner le regard, de gène ou de pitié.

Cette infirmité entraîne d’autres tourments comme la lassitude face aux difficultés. Après avoir consulté les meilleurs spécialistes du pays, il a perdu foi en toute possibilité d’amélioration de sa condition. On se sent comme piégé dans des abysses qui ne laissent entrevoir aucune lumière.

Malgré le fait qu’il sache qu’il n’est pas jugé par sa femme ou ses filles, Albert reste sur la défensive quant à sa maladie. Les conseils que j’ai évoqués plus haut, promulgué par des personnes qui ne rencontrent aucune difficultés, sont particulièrement frustrant au vu de leur apparente facilitée et ne forment qu’une source de frustration supplémentaire pour Bertie.

L’un des rares qui ne se permet pas de lui prodiguer pas des conseils et qui le comprend vraiment est Wilson Churchill qui lui avoue avoir lui aussi souffert d’un problème d’élocution.

Le prince est seul dans sa maladie et face à la pression familiale. Tout le monde attend de lui qu’il fasse des discours et côtoie des gens qu’il n’a pas envie de voir. Il est soumis à l’incompréhension de son père qui n’a pas confiance en son fils, l’hypocrisie générale de la cours et à l’irresponsabilité de son frère qui vit dans sa passion amoureuse égoïste, faisant fi de son héritage et futur statut de roi.

Le long métrage est aussi une montée en pression pour Albert qui comprend progressivement que son frère sera inapte à remplir correctement ses fonction et qu’il sera de son devoir de porter ce fardeau royal.

Le Lion et le Rat

 

          « On a souvent besoin d’un plus petit que soit », telle est la morale de la fable le Lion et le Rat de Lafontaine où un brave rat vient au secours d’un fort et majestueux lion pris au piège dans un filet de maille.

La métaphore décrit parfaitement le récit du film dans lequel un petit rat australien de la classe moyenne vient en aide à un lion bègue aux lourdes responsabilités. On pourrait faire une analogie entre cette métaphore et l’idée de classe sociales. En effet, les membres de la haute société sont dépeints comme hypocrites et indifférent vis-à-vis du prince. A l’inverse, Lionel Logue, l’homme qui va aider Bertier à surmonter son bégaiement, n’accorde aucune importance au statut de son patient. C’est cet acteur raté, cet homme du peuple qui vit modestement, celui méprisé parce qu’il vient d’un Dominion qui va sauver le royaume en délivrant son roi de la maladie.

Mais sa principale différence vient du fait qu’il a su voir un homme là où tout les autres ne voyaient qu’un titre. On comprend dès lors qu’il est davantage question d’amitié que de problématiques sociales. Sans jamais être intrusif, Logue va entrer dans l’intimité de Georges VI et l’aider à surmonter de l’intérieur ses problèmes d’élocution qui ne sont pas simplement mécaniques. Il est le thérapeute, le confident et l’ami du roi. Il n’est pas spécialiste et tout les orthophonistes le considèrent comme un charlatan mais c’est sa bienveillance et sa volonté d’aider les autres qui font son efficacité. Malgré des moments de tension avec Albert, il ne cessera jamais de soutenir son ami qui lui rendra l’honneur qu’il mérite.

Conclusion

          Finalement, on comprend que ce film est un message d’espoir face à la maladie. La situation du roi décrite comme perdue par lui-même va être résorbée par un homme qui se présentera comme un ami plutôt que comme un médecin. Pourtant, Logue va davantage soigner Albert de sa solitude plutôt que de son bégaiement. Il va lui faire regagner confiance en lui et lui apporter une oreille attentive. Le message du film est aussi simple que cela mais c’est ce qui fait sa puissance.  

Rappelez vous juste que vous ne pourrez que rarement vous en sortir seul. Comptez sur vous amis comme ils pourront compter sur vous une fois l’heure venue. Ils représentent à peu près votre seul luxe ici-bas.

A mes amis, merci.

Etienne Wassouf