Aujourd’hui, maman est morte. Ou peut-être hier, je ne sais pas. J’ai reçu un télégramme de l’asile : « Mère décédée. Enterrement demain. Sentiments distingués. » Cela ne veut rien dire. C’était peut-être hier. 

Par ces présents mots, c’est avec beaucoup de détachement que Albert Camus initie la plus belle de ses histoires, qui est également l’une de ses plus froides. Pour son premier roman, c’est au personnage de Meursault qu’il donne vie. Entre pudeur, deuil et simplicité, plongez dans l’univers de l’absurde, du génie du genre. 

LE TEMPS ME MANQUAIT POUR M’INTERESSER A CE QUI NE M’INTERESSAIT PAS

L’Étranger raconte la méchanceté du quotidien, l’ambivalence du soleil, la tendre indifférence du monde et la folie des hommes, sacrifiant sur l’étal de leurs certitudes celui qui, parce qu’il ne sait pas mentir ni pleurer, ne leur ressemble pas.

D’abord, ce qui nous frappe avec le personnage de Meursault, c’est qu’il semble traduire le style du roman. Froid, simple mais aussi plus chaleureux vers la fin, frôlant le poétique, le roman est un véritable.

Incapable de donner un sens à sa vie, il est comme une feuille sur un arbre, comme un grain de sable sur une plage, bref un être inexpressif face à l’immensité du monde.

Pris par la mécanique de son quotidien, Meursault est ce que l’on appellerait aujourd’hui un marginal de la société, un paria même.

« Quand je me suis réveillé, Marie était partie. Elle m’avait expliqué qu’elle devait aller chez sa tante. J’ai pensé que c’était dimanche et cela m’a ennuyé : je n’aime pas le dimanche. Alors, je me suis retourné dans mon lit, j’ai cherché dans le traversin l’odeur de sel que les cheveux de Marie y avaient laissée et j’ai dormi jusqu’à dix heures. J’ai fumé ensuite des cigarettes, toujours couché, jusqu’à midi. Je ne voulais pas déjeuner chez Céleste comme d’habitude parce que, certainement, ils m’auraient posé des questions et je n’aime pas cela. Je me suis fait cuire des œufs et je les ai mangés à même le plat, sans pain parce que je n’en avais plus et que je ne voulais pas descendre pour en acheter. »

L’ABSURDITE EST SURTOUT LE DIVORCE DE L’HOMME ET DU MONDE

La structure du roman a également suscité des critiques. Le livre est divisé en deux parties : la première partie décrit les événements qui ont conduit Meursault à tuer l’Arabe, tandis que la deuxième partie traite de son procès et de sa condamnation à mort. Certains critiques ont reproché à cette structure de manquer d’unité et d’équilibre, car les deux parties semblent n’avoir aucun lien direct l’une avec l’autre.

La vision de la vie et de l’humanité présentée dans L’Étranger a également été critiquée. La philosophie existentielle de Camus souligne l’absurdité de la vie et la mort inévitable, ce qui peut être interprété comme une vision pessimiste de l’existence humaine. Cependant, d’autres critiques ont également interprété cela comme une célébration de la liberté individuelle et de la prise de conscience de l’absurdité de la vie, qui peut être libératrice pour ceux qui embrassent leur propre existence sans chercher à lui donner un sens absolu.

TOUT REFUS DE COMMUNIQUER EST UNE TENTATIVE DE COMMUNICATION ; TOUT GESTE D’INDIFFERENCE OU D’HOSTILITE EST APPEL DEGUISE

Le minimalisme de Camus se caractérise par une prose simple et concise, qui évite les ornements inutiles et se concentre sur l’essentiel. Dans L’Étranger, par exemple, Camus utilise des phrases courtes et directes pour décrire les événements, ce qui donne une impression de détachement et de froideur. Cette économie de moyens permet de créer une distance entre le personnage et le lecteur, renforçant ainsi le sentiment d’étrangeté qui imprègne le roman.

Cette simplicité de style est également présente dans d’autres œuvres de Camus, telles que La Peste ou La Chute. Dans ces livres, l’auteur utilise des phrases courtes et des descriptions précises pour décrire les situations et les émotions des personnages. Cette économie de moyens permet à Camus d’exprimer des idées profondes de manière claire et concise.

En réduisant l’écriture à l’essentiel, le minimalisme de Camus permet également au lecteur de se concentrer sur l’essence de l’histoire et des personnages. En éliminant les détails inutiles, Camus laisse place à l’imagination du lecteur, qui peut ainsi interpréter les événements de manière personnelle et profonde.

PARCE QUE C’ÉTAIT LUI, PARCE QUE C’ETAIT MOI 

Meursault et Marie sont des personnages clés dans le roman L’étranger d’Albert Camus. La relation entre les deux personnages est complexe et témoigne de la personnalité étrange et détachée de Meursault, ainsi que de sa difficulté à nouer des liens émotionnels avec les autres.

Marie est présentée dès le début du roman comme la petite amie de Meursault.

Ils ont une relation plutôt superficielle et physique, basée sur le plaisir et l’attirance physique. Meursault est heureux d’être avec Marie, mais n’a pas de sentiments profonds pour elle et ne semble pas s’engager émotionnellement dans leur relation.

Cependant, lorsqu’ils se séparent après que Meursault a commis le meurtre qui le mène en prison, Marie continue à lui rendre visite et à le soutenir dans son épreuve judiciaire. Meursault semble apprécier sa présence, mais ne montre pas de réelle reconnaissance ou de sentiment amoureux à son égard.

La relation entre Meursault et Marie est donc une illustration de l’indifférence et de la superficialité des relations humaines dans la société décrite dans le roman. Meursault est incapable de ressentir des émotions profondes pour qui que ce soit, y compris pour sa petite amie, et cela le rend encore plus étranger et déconnecté de la société.

Dans L’étranger d’Albert Camus, il n’y a pas de citation spécifique où Meursault parle de son amour pour Marie, car leur relation est davantage basée sur l’attirance physique et la satisfaction de leurs besoins charnels que sur des sentiments amoureux profonds. 

Cependant, voici une citation qui illustre la relation de Meursault avec les autres, y compris avec Marie :

« Je me suis alors expliqué que j’étais comme tous les autres, que je n’avais rien de particulier, et qu’un jour j’aurais une famille, des enfants, des soucis. C’était peut-être vrai, mais cela ne me réconfortait pas. Autant dire que je portais en moi l’odeur de cette chambre, celle de mon corps, celle de Marie et celle de la plage. »

CONCLUSION

Finalement, c’est plus qu’un simple roman que Camus nous offre avec l’étranger, c’est une invitation à vivre, et à vivre pleinement, sans limites.

« En y réfléchissant bien, je n’étais pas malheureux. Quand j’étais étudiant, j’avais beaucoup d’ambitions de ce genre. Mais quand j’ai dû abandonner mes études, j’ai très vite compris que tout cela était sans importance réelle. »

 

Merci de votre lecture ! 

Erwin David