Rocky est un boxeur de seconde zone habitant un quartier pauvre de Philadelphie. Pas de famille, peu d’amis, un destin gâché, Rocky semble incarner l’échec, loin des standards américains de réussite. A travers le film, Rocky va pourtant essayer de rattraper le temps perdu et va tout mettre en œuvre pour saisir la dernière chance qu’on lui offrira dans sa carrière, affronter le champion du monde de boxe, Apollo Creed.

Mais Rocky, ce n’est pas qu’un film de boxe, bien au contraire. Le film raconte le combat d’un homme, pas contre les autres, mais plutôt contre son propre destin. Contrairement aux autres boxers, il ne se bat pas pour la gloire ou la richesse, mais plutôt pour prendre sa revanche sur une vie qui ne lui a pas fait de cadeaux.

Se battre pour la gloire ou se battre pour soi

Tout le film s’articule autour du combat qui oppose Apollo et Rocky. Et, ce qui les oppose, au-delà de leur situation, un champion du monde au sommet de sa carrière et un petit boxeur de banlieue, c’est ce qui les anime. Creed ne boxe pas pour des raisons nobles, il se désintéresse complètement de ses adversaires, se laisse guider par son manager. Il incarne tout ce qu’il y a de plus superficiel dans la réussite telle qu’elle est imaginée selon l’idéal du rêve américain : richesse ostentatoire, notoriété, mépris. Tout est caricatural dans la représentation d’Apollo : sa tenue aux couleurs des Etats-Unis, son entrée sur le ring, son discours. Même son nom, l’élève au rang d’un véritable dieu, le dieu le plus beau et le plus honoré dans la mythologie grecque : Apollon.

A l’inverse, Rocky est plutôt pathétique, il a souvent échoué. C’est un immigré italien que tout le monde rabaisse : ses adversaires, et même son entraîneur, qui dès le début du film s’adresse à lui avec violence pour lui rappeler qu’il aurait pu accomplir de grandes choses, mais qu’il n’a jamais exploité son talent et qu’il mène aujourd’hui une existence misérable. C’est pourtant Rocky qui incarne les valeurs américaines telle que le mérite et la combativité à travers tout le film, contrairement à Apollo.

Une autobiographie ?

En plus de la manière dont il est représenté, ce qui rend le personnage de Rocky aussi touchant, c’est le fait que Stallone l’ait écrit en s’inspirant grandement de son propre vécu. Tout comme Stallone dont les débuts de carrière étaient plus que modestes, Rocky a vécu dans la misère, contraint d’accepter des jobs minables pour s’en sortir. Dans le film, il travaille pour le compte d’un usurier véreux pour arrondir ses fins de mois. Il finit par quitter ce travail alors que son employeur lui demande de casser les doigts d’un de ses clients pour qu’il le rembourse.

En fait, Rocky est avant tout un personnage très humain, très authentique et finalement peu violent. Bien qu’il ne soit pas exemplaire, que ce soit dans son mode de vie, sa façon de parler, les gens qu’il fréquente (des alcooliques, des délinquants), Rocky est un personnage droit, avec de vraies valeurs. On perçoit ses qualités humaines d’abord dans son rapport aux autres, que ce soit à Adrian, Polly ou à Mickey son coach. A travers son interprétation de Rocky, Stallone est bien loin de l’image caricaturale qu’on a de lui, dont la filmographie laisse surtout apparaître des films d’action un peu brutaux. Ici, il interprète brillamment un personnage maladroit, sensible et désabusé.

Rocky est un film touchant, avec une ambiance très particulière qui peut faire penser à ce que l’on retrouve dans taxi driver. Tous deux sortis en 1976, ces films mettent en scène une vision assez obscure des villes américaines. On y retrouve beaucoup de plans de nuit dans lesquels on rencontre des personnages peu fréquentables, des immeubles délabrés… En tout cas, que vous l’ayez déjà vu ou non, vous trouverez toujours quelque chose à tirer de ce film.