«Évidemment, ils ont tout : les hommes, la puissance de feu, le temps. Nous jouons dans leur casino, avec leurs cartes et leurs jetons». Voilà qui représente tout le déséquilibre de la lutte dans laquelle s’engage le héros de cette histoire.   

     

                     Running Man est un roman d’anticipation de Stephen King, publié en 1982 sous le pseudonyme de Richard Bachman. L’auteur nous plonge dans un monde dystopique non pas à travers un personnage révolutionnaire voulant rendre le monde meilleur mais dans la peau de Benjamin Richards, homme marié et père d’une jeune fille malade. Dans cette société futuriste à l’État totalitaire, la grande partie de la population est chaque soir scotchée devant sa télévision qui diffuse des jeux où les participants risquent leur santé ou quelques membres de leur corps pour des poignées de dollars.

 

 

 

                          Ben Richards décide de participer, désireux de gagner assez d’argent pour offrir des soins à sa fille et sortir sa famille de sa vie de misère. Il se retrouve inscrit au jeu phare de la chaîne, mais aussi le plus dangereux : The Running Man, chasse à l’homme mortelle à travers les États-Unis, chaque heure de survie augmente les gains versés à la famille du participant, néanmoins, le pays entier est son ennemi, chaque information pour le retrouver rapportant 1000$.

                               Ce thème de survival game crée déjà une ambiance intrigante, on pense bien sûr entre-autres à Hunger Games; et Stephen King nous montre qu’il maîtrise indéniablement ce genre d’histoire. La simple forme du récit, en 100 courts chapitres sous forme de compte à rebours nous rappelle sans cesse que la fin du parcours de Richards se rapproche inexorablement, nous plaçant, d’une certaine façon, nous aussi comme spectateurs de ce programme dont il est prisonnier. L’une des très grandes prouesses de cet ouvrage est de réussir à non pas simplement maintenir le suspense, mais à l’accroître tout au long de l’avancement de l’histoire. Richards doit faire face à l’hostilité de la plupart des citoyens et la détresse de sa situation souligne le fait qu’il est un personnage fort, de par son caractère bien trempé et l’ingéniosité dont il fait preuve. L’aspect haletant de l’intrigue doit beaucoup à la forme d’apparente partie de poker que prend ce jeu mortel, où prises de risques, bluff et triches cohabitent.

 

       Un aspect particulier est également la rudesse du langage employé et des évènements dépeints. Évidemment il s’agit d’une fiction mais l’aspect dystopique a poussé l’auteur à soigner le détail des descriptions et à ne pas omettre la cruauté des situations dans lesquelles les personnages se trouvent, la plume de Stephen King nous fait ainsi visualiser très clairement les maladies, souffrances et blessures des concernés. Mais cette forme de violence que nous inflige l’auteur, et qui nous fait compatir avec Richards, n’est pas uniquement due à une qualité littéraire et s’impose également par des révélations brusques au cours du récit, ébranlant toute stabilité, telles des coups de massue, rajoutant à la tension, véritable moteur de cette aventure.

 

 

                               L’un des atouts de ce roman est la finesse dont il arrive à faire preuve. Venant d’une dystopie on pourrait s’attendre à une critique pleine et entière sous couvert moralisateur mais le message est véhiculé bien plus subtilement puisque même si Richards s’essaye à l’idée d’agir pour le plus grand bien, le récit nous montre que ses actions tirent leurs forces d’intérêts et de ressentis personnels, le personnage étant davantage animé par une forte rage que par une bien-pensance.

 

 

 

                                         Il s’agit donc d’une dystopie aussi courte que captivante, une adaptation en film avec Arnold Schwarzenegger a également été réalisée mais est beaucoup plus classique, et le scénario est très éloigné du livre, ne conservant que l’idée d’un jeu mortel et le nom de quelques personnages.