La seule façon de renforcer notre intelligence est de n’avoir d’idées arrêtées sur rien, de laisser l’esprit accueillir toutes les pensées. – John Keats
Plutôt amateur de polar ou de littérature française ? Si vous souhaitez tenter la science-fiction, mais n’avez jamais su par où commencer, je ne peux que vous recommander Hypérion, par Dan Simmons. Ce classique de la SF vous fera voyager à travers l’espace et les styles littéraires, dans une compilation de récits épiques ou mystérieux.
L’œuvre est décrite comme un Space Opera, sous-genre courant de la SF, rendu populaire avec des œuvres comme Star Trek et Star Wars. Dans un futur lointain, l’humanité a quitté la terre et évolue dans l’espace. La plupart du temps, ce genre met en avant des intrigues géopolitiques complexes et des récits d’exploration.
Que referment les énigmatiques Tombeaux du Temps ? Qui est la légendaire créature qui les hante, le Gritche, monstre sanguinaire vénéré sur Hypérion ?
L’église lui vouant un culte fait appel à 7 individus venus de quatre coins du monde, ou pardon, des centaines de mondes colonisés après la destruction de la Terre. « Un pèlerinage, rien de bien palpitant » me direz-vous. Ajoutez au voyage une menace de guerre interstellaire avec un peuple mutant, des forêts en feu, des locaux formant une secte assassine et une divinité serial-killer. Ah oui, j’ajoute aussi que personne n’en est jamais revenu. Tout de suite, ça rajoute un peu de piquant à l’aventure.
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Diversité des personnages, pluralité des styles
Pour vous accompagner dans la découverte de cet univers si riche, vous lirez le récit personnel des 7 pèlerins. Des histoires de guerre interstellaire à la simple complainte d’un père dont la fille subit une étrange maladie, ces nouvelles incorporées au livre permettent à l’auteur de décrire son univers sous des angles multiples. Tous sont connectés d’une manière ou d’une autre à Hypérion et au Gritche : Le poète, le soldat, le prêtre, l’érudit, le politique, le détective, le capitaine… Chaque histoire développe le scénario et ajoute de la profondeur au récit, le faisant passer d’un banal livre de SF à un véritable chef d’œuvre, une critique pointue et visionnaire de l’humanité.
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Un pèlerinage interstellaire
Après la perte de la Terre, l’humanité se disperse à travers l’espace et colonise d’autres planètes, détruisant les écosystèmes locaux et essayant sans cesse de les remodeler à l’image de leur planète perdue. En vain.
Dan Simmons nous décrit l’humanité comme un peuple orphelin, qui n’a plus sa place dans l’univers et qui cherche à retrouver son confort d’antan, incapable d’aller de l’avant. Ces thèmes sont repris dans l’histoire des pèlerins du Gritche. Chacun a vécu des pertes, des échecs, des frustrations qui les dépouillent de leur capacité à tourner la page.
Un vent de nostalgie souffle entre les pages d’Hypérion. Une beauté perdue, un passé doux-amer qui donne au lecteur de la Planète Bleue un petit pincement au cœur. Dan Simmons nous livre des magnifiques descriptions des planètes, et pourtant, après l’émerveillement initial, on ressent toujours l’envie de rentrer à la maison.
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Keats : l’empreinte hétéroclite d’un poète romantique
La poésie de la terre ne meurt jamais. – John Keats
Les thèmes de la beauté et de la perte sont récurrents dans l’œuvre de Keats, poète romantique qui a inspiré Simmons.
Les œuvres de Simmons et Keats montrent toutes deux à quel point il est difficile de se relever après de grandes pertes. Elles font appel à nos émotions les plus profondes et primaires, l’empathie par exemple. On en ressent beaucoup pour ces pèlerins voués au sacrifice, malgré leurs péchés et caractères parfois éprouvants.
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Le rapport à Dieu
Avec l’avancée de la technologie, les hommes sont devenus tout-puissants. Ils ont créé des Intelligences Artificielles conscientes aux capacités cognitives supérieures à leurs créateurs. Ils ont créé des planètes, en ont anéanti d’autres. Ils sont capables de retarder leur mort et de recréer la vie à l’identique… Créateurs et destructeurs, maîtres de leur propre destinée : qu’est ce qui les séparent des dieux désormais ?
Dan Simmons abord le sujet sans porter de jugement engagé, et pousse son lecteur à réfléchir sur l’avenir d’une Humanité qui possède tous les outils pour s’épanouir, mais qui cherche encore un sens à sa vie.
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Dan Simmons : un écrivain visionnaire
Situons à nouveau le contexte : Dan Simmons débute le cycle « les Cantos d’Hypérion » en 1989, avant l’ère du numérique. Il avait pourtant imaginé l’avènement d’un réseau reliant hommes et machines, noyant l’humanité dans un flot constant d’information et de données, les rendant incapables d’agir.
Prenez une grande bolée d’oxygène de l’Ancienne Terre, vous en aurez besoin pour le voyage. Simmons ne ménage pas son lecteur, le plongeant directement dans l’intrigue, l’assaillant de termes Sci-Fi montés de toutes pièces, et le finissant à coups d’intrigues politiques interplanétaires qui ferait pâlir Georges Lucas. Mais si vous survivez à l’entrée en hyperespace, vous découvrirez une saga SF charnière de son genre, dans un format original : les 7 pèlerins racontent tour à tour leur histoire, ce qui les a amenés à être choisis pour ce voyage. A vous maintenant d’embarquer…